L’importance des hommes de réseaux dans les relations internationales – Entretien avec Michel Tabanou, Homme de réseau et élu de la république Française

Entretien publié le 14 Mars 2020

Centre Algérien de Diplomatie Économique : Bonjour Monsieur Tabanou, avant d’entamer le fond de l’entretien, pourriez-vous vous présenter auprès de nos lecteurs ?

Michel Tabanou : Je suis d’abord un grand voyageur et mon île natale de Madagascar m’a enseigné par nature à dépasser les rivages et à regarder au delà des horizons. Je suis d eformation artistique et ai exercé des années la profession de libraire en livres anciens. Du monde artistique j’ai retenu que l’artiste Robert Filliou, mon parrain, à la fin des années 70 avait le tout premier développé la notion de network et que le vingtième siècle avait été l’essor des réseaux avec Dada, le Surréalisme et au cours des années 60 Fluxus. Necessité du réseau pour développer en groupe son art et le faire vivre. Aujourd’hui cela fait presque 20 ans que je préside un Centre d’Art à Paris et j’ai exercé deux mandats d’élu républicain pour la ville de Fontenay-sous-bois. L’un dans la culture et les réseaux de la FNCC et l’autre à l’international avec le réseau de CUF. J’ai compris pour son essor comment agréger ma ville à un réseau et comment également transmettre notre expérience territoriale.

CADE : En dépit de vos différentes fonctions, vous êtes un homme de réseaux. Qu’est-ce qu’un homme de réseaux ?

Michel Tabanou : C’est un homme d’ouverture et me concernant d’ouverture sociale, culturelle avec une pointe d’humanisme… Le réseau étant un maillage structuré, je suis conscient de la place de chacun et n’en néglige donc aucun aspect. Comme dans tout jeu de construction, l’équilibre est atteint lorsque chaque élément fait corps avec l’ensemble. Je suis donc un homme de coordination et de mise en relation.

CADE : Vous êtes très porté vers l’international, très actif dans différents dossiers, vous connaissez des personnalités influentes dans les quatre coins du monde. Comment avez-vous construit un réseau international ? ou plutôt, comment on le construit ?

Michel Tabanou : Construire un réseau c’est tout d’abord une question de temps, de patience. Cette latence imposée nous entraîne vers l’obligation de nous poser la question de l’efficacité. A partir de ce moment la Raison prend le relais et naît le temps du travail en réseau que l’on a sollicité ou qui nous a sollicité. Le temps, donc, est un facteur primordial mais sans une connaissance affinée des milieux où l’on évolue celui-ci ne suffit pas. Il faut pouvoir développer la curiosité, l’éveil, l’écoute et plus que tout autre chose au monde donner de soi une image où chacun s’accorde à vous considérer comme partenaire, correspondant fiable. Le réseau est une chaîne de confiance et d’information tout autant de décision et votre place dans celui-ci doit répondre à ces critères. A l’international j’ai établi le principe de réciprocité et toujours sollicité l’approche d’un dénominateur commun où la relation s’épanouit et j’en oublie également certains particularismes qui font que je suis français pour me fondre dans un bien commun qu’il nous appartient de développer.

CADE : L’entretien du réseau est incontournable si on veut préserver et/ou agrandir son champ d’influence. Comment peut-on le faire ?

Michel Tabanou :  Un réseau n’est jamais inerte ou s’il le devient il s’asphyxie, s’étouffe et finit par mourir. Il doit s’entretenir, il doit s’enrichir parfois d’autres connexions, d’autres ramifications. Il doit se diversifier pour se complexifier et atteindre les objectifs qui sont posés. Pour mieux cerner les réussites je croise depuis des années en interactions différents réseaux dans lequel j’évolue, j’opère un décloisonnement. Le politique, le culturel, les affinités, la connaissance des liens comme l’intuition de leur faiblesse et tout simplement l’empathie m’ont permis d’éviter certains écueils. Mais il est indéniable que j’évite que la machine ne se grippe et les mises à jour sont une constante de bonne santé du réseau.

CADE : Plusieurs organisations /clubs /cercles /tribus /personnalités /centres..etc sont ou se disent influentes. Est-ce qu’on peut mesurer l’influence d’une personne ou d’un organisme ? Si oui, comment ?

Michel Tabanou :  Les influences sont multiples tout comme l’intelligence diversifiée. Je n’aime pas l’influence. Je m’en détourne le plus possible. Il y a certes des gens d’influence dans mes réseaux mais je travaille plus avec ceux qui s’en détournent car tout mon travail réside sur la sureté des compétences et non la facilité des passes droits.

CADE : Enfin, Quel est l’importance et le rôle des hommes de réseaux pour les entreprises et les Etats ?

Michel Tabanou : Par réseaux je fais naturellement abstraction de ceux dits réseaux sociaux qui sont un avatar de la communication et dont les disparités et les fluidités des membres portent plus d’amalgames que de solutions, plus d’aventures que de projets. Les réseaux qui sont l’objet de cet interview appartiennent à un maillage structuré d’hommes ou de femmes qui exercent un pouvoir de relais ou décision au cœur du politique et de l’économie. Les acteurs de réseaux interviennent dans les lieux de pouvoir avec pour objet d’influencer, de contrôler, d’encadrer mais aussi de faciliter, de réduire les intermédiaires. Certains définissent les règles du jeu et donnent le cadre d’orientation. La place de l’homme de réseau est centrale et si les entreprises et le pouvoir économique sont les principaux détenteurs du pouvoir d’autres acteurs pèsent avec effets variables sur les décisions du pouvoir économique. Les hommes de réseaux jouent un rôle également important dans ce « contre-pouvoir» que l’on reconnaît dans l’émergence par exemple de forces sociales qui ont la capacité de limiter et d’orienter certaines actions des pouvoirs économiques. Le monde réseau est diversifié et sa place est centrale et aujourd’hui il joue un rôle essentiel dans tous les ressorts politico-économiques de nos sociétés. Dans mes relations je joue avec ces oppositions et l’art du réseau est de ne pas fracturer le dialogue mais de comprendre sa nécessité, sa finalité.

Entretien réalisé par l’équipe du Centre Algérien de Diplomatie Economique.

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