L’importance du renforcement de la coopération économique et culturelle entre L’Algérie et la Suède – Entretien avec Son Excellence Björn Häggmark, Ambassadeur de Suède en Algérie

Entretien publié le 04 Avril 2022

Présentation de S.E.M l’Ambassadeur Björn Häggmark :

Ambassador Björn Häggmark was in March 2021 appointed as ambassador to Algiers by the Swedish government where he will take up his new position in the fall of 2021.

Ambassador Björn Häggmark was appointed as ambassador to Cambodia in 2019 and before coming to Asia, Björn Häggmark had already accomplished a long diplomatic career as head of the Ministry of Foreign Affairs’ Real Estate and Logistics Unit. He has also served at the embassies in Bogotá, Madrid, and Nairobi as well as at Sweden’s representations in Brussels and Strasbourg.

Mr Häggmark has also worked at the MFA headquarters in Stockholm. During Sweden’s EU Presidency in 2001 he was seconded to the EU High Representative of Foreign Affairs and Security Policy in Brussels.

.

CADE : Monsieur L’Ambassadeur, les relations entre la Suède et l’Algérie remontent à 1727. Le premier consulat de Suède en Algérie a été établi en 1729, à la suite de la signature du traité de paix. Trois siècles plus tard, comment qualifieriez-vous les relations actuelles entre la Suède et l’Algérie ?

S.E.M. Björn Häggmark : Les relations entre la Suède et l’Algérie sont excellentes. L’amitié entre les deux pays est fondée sur le respect mutuel et sur des échanges continus surtout dans les domaines économiques et culturels. En ce qui concerne les relations politiques, les deux pays attachent une grande importance au droit international, à la coopération multilatérale et à la solidarité comme base pour un développement durable. S’agissant de la paix et la prévention des conflits, le droit international doit être respecté par tous les pays, un principe que la Suède applique vigoureusement.

Le rôle que joue l’Algérie face aux défis auxquels est confronté le continent Africain évoque beaucoup d’intérêt. Comme représentant de la Suède, je suis touché et fier de l’appréciation des algériennes et algériens du soutien de mon pays pour l’indépendance et le développement de l’Algérie. La Suède et l’Algérie souhaitent approfondir et élargir leurs contacts et échanges dans plusieurs domaines, y compris la transition verte, la numérisation, la recherche et la sous-traitance industrielle. L’égalité des genres est un pilier dans la société suédoise qui est d’intérêt dans nos relations bilatérales.

La Suède est membre de l’Union européenne, ses rapports avec l’Algérie sont donc aussi régis tant par l’Accord d’association entre l’UE et l’Algérie que par le Partenariat de voisinage. Ces derniers offrent encore bien des possibilités à mettre en œuvre.

.

CADE : Quels sont les qualité et volume des échanges commerciaux entre la Suède et l’Algérie ? Et quels sont les principaux secteurs concernés ?

S.E.M. Björn Häggmark : En 2021, les exportations suédoises vers l’Algérie se sont élevées à 2,46 milliards de couronnes suédoises (257 M USD), en recul de 26,23% par rapport à 2020. Elles sont composées principalement de machines et équipements (30,15%), bois et dérivés (28,28%), produits chimiques et dérivés (15,3 %) et minerai de fer (9.94%). Ces catégories incluent par exemple des équipements de télécommunication, des médicaments et équipement médical, des machines pour la production industrielle. J’espère que la gestion algérienne des importations facilitera plus d’exchanges qui contribueront à la modernisation de l’économie algérienne.

Les exportations algériennes vers la Suède s’élèvent quant à elles à 115 millions de couronnes suédoises (12 M USD), en hausse de 66,7% sur un an. Elles se composent de combustibles minéraux, lubrifiants et matériaux connexes (71,3%), produits chimiques et dérivés (20%), produits manufacturés (6,17%) et dattes (2,52%).

.

CADE : Concernant la coopération scientifique et culturelle (échanges universitaires, évènements culturels…etc.), quels sont les dispositifs mis en place par la suède pour encourager cela ?

S.E.M. Björn Häggmark :  Il y a un grand intérêt des deux côtés pour promouvoir les échanges culturels. L’ambassade et l’Institut suédois collaborent pour faciliter les contacts entre praticiens de la culture, malgré les ressources limitées. Chaque année, la Suède prend part à plusieurs manifestations culturelles organisées par le ministère de la Culture (Salon International du Livre d’Alger – SILA, Festival International de Musique Andalouse et de Musiques Anciennes, Festival de la Bande Dessinées d’Alger – FIBDA…). L’Ambassade participe aussi aux activités culturelles initiées et chapeautées par l’Union européenne en Algérie (Festival européen, Rencontre Euromaghrébines des écrivains, Journées du film européens…). Nous essayons de privilégier au maximum les échanges d’expériences et de points de vue notamment à travers l’organisation de Masterclass animés par des artistes et experts suédois.

Chaque année, plusieurs films algériens sont sélectionnés en compétition officielle du festival du film arabe à Malmö (MAFF). En 2020, le film documentaire « Leur Algérie » de la réalisatrice franco-algérienne Lina Soualem a décroché le prix spécial du jury.

J’espère que nous pourrons créer encore plus de contact et de coopération entre nos deux pays afin que cela profite à la jeunesse algérienne qui regorge de talents, notamment féminins. L’ouverture aux autres stimule la créativité, tant nécessaire pour le développement et l’égalité, au sens large, dans nos sociétés.

L’Institut suédois à Stockholm propose deux programmes de formation en leadership pour lesquels les algérien(ne)s sont éligibles. Le premier « SheEntrepreneurs » s’adresse aux femmes entrepreneures qui souhaitent faire évoluer leurs compétences et développer leur réseau à l’international. Le second « SI Leaders Lab » s’adresse aux jeunes leaders d’opinion engagés pour les questions d’égalité des genres. Chaque année nous découvrons avec joie les excellents profils algériens sélectionnés et nous sommes ravis de compter un réseau d’Alumni de ces deux programmes.

Parmi les entreprises suédoises présentes en Algérie, certaines coopèrent et soutiennent des start-ups algériennes. A titre d’exemple, Ericsson a sponsorisé l’espace Startup lors du salon ICT Maghreb 2022, Salon international des Technologies de l’Information et de la Communication. Grâce à ce soutien, des dizaines de jeunes porteurs de projets innovants activant dans des domaines tels que de la robotisation, la logistique, le e-commerce, la e-santé ou encore le big-data ont eu la chance de présenter leurs produits et services aux professionnels des TIC.

L’ambassade a l’intention d’organiser des rencontres entre les chercheurs et académiciens des deux pays pour qu’ils – et leurs institutions – puissent explorer des possibilités de coopération.

.

CADE : D’après nos investigations, beaucoup d’investisseurs Suédois hésitent à investir massivement en Algérie. À votre avis, qu’est-ce qui empêche ces-derniers de le faire ? Et comment l’Algérie peut-elle améliorer le climat des affaires pour les attirer ?

Ambassadeur Björn Häggmar : Parmi les plus grandes entreprises suédoises, beaucoup sont présentes en Algérie depuis longtemps. Le secteur privé en Suède considère l’Algérie comme un marché intéressant avec grand potentiel de diversification et de modernisation pour une croissance durable. Je note cependant qu’il y a besoin de progresser avec la réalisation des réformes en Algérie. Des aspects clés sont le renforcement de l’État de droit et la prédictibilité des normes, la modernisation de l’administration et la création d’un secteur financier et banquier moderne. Avec son capital humain l’Algérie a un atout important. L’accession de l’Algérie à l’Organisation mondiale de commerce serait un pas important. Pour satisfaire les clients des produits et services, la protection de l’environnement et la transition verte doivent avancer. Les conditions de travail, y inclus l’égalité des genres, sont aussi importants quand les entreprises considèrent où investir. Tout cela améliorerait le climat des affaires en Algérie.

.

CADE : Concernant la diaspora Algérienne en Suède, qu’elle est son rôle dans la dynamisation et/ou le renforcement des différents échanges (économiques, académiques et culturelles) algéro-suédois ? Et comment pourrait-elle consolider son apport dans le cadre de cette coopération ?

Ambassadeur Björn Häggmar : L’ambassade est ouverte aux contacts et activités proposés par des membres de la diaspora, mais nous ne disposons pas d’un programme spécifique pour engager cela. La participation civique, les efforts académiques et scientifiques ainsi que les activités professionnelles constituent des plateformes pour dynamiser les échanges. Nous sommes toujours très heureux de prendre connaissance des initiatives entreprises par la diaspora algérienne en Suède, tout comme nous sommes à chaque fois ravis de rencontrer toute personne travaillant au rapprochement culturel ou économique entre les deux pays.

.

CADE : Autre sujet, le réchauffement climatique devient un aspect incontournable dans les relations internationales. La Suède est exposée à ce phonémonène. Elle est également très avancée dans le domaine de l’écologie. Y a-t-il en ce sens des projets en cours ou prévus avec l’Algérie ?

Ambassadeur Björn Häggmar : En effet, le climat est une priorité forte pour la Suède sur le plan national ainsi que mondial. Beaucoup de mesures sont nécessaires chez nous et dans le monde pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. Ces mesures ne peuvent pas attendre.

A travers l’initiative « Fossil-free Sweden », ou Suède sans fossiles, le Gouvernement suédois a un objectif clair, celui de faire de la Suède l’un des premiers pays sans énergie fossile au monde l’horizon 2045. L’organisation Fossil-free Sweden a été créée à l’initiative du gouvernement en 2015 pour accélérer le rythme de la transition indispensable. L’objectif est de bâtir une industrie forte et de créer plus d’emplois et de possibilités d’exportation en devenant exempte de combustibles fossiles. Grâce à la collaboration avec des entreprises, des industries, des municipalités et des régions, Fossil-free Sweden s’efforce d’identifier les obstacles et les opportunités pour accélérer le développement. De nos jours, 22 secteurs de l’industrie ont créé des feuilles de route pour opérer sans fossiles. De voir les résultats quand on combine un objectif net, du savoir-faire et de la coopération inspirent et donnent de l’espoir ! L’ambassade a l’intention d’organiser une rencontre à Alger sur ce thème en 2022.

De nombreuses industries et entreprises suédoises sont à l’avant-garde. La capacité d’innover et les technologies de pointe de la Suède peuvent aider d’autres pays à respecter leurs engagements dans le cadre de l’Accord de Paris. Cela peut inclure le développement urbain durable, la production d’acier sans fossiles, la production de batteries à grande échelle, le ciment climatiquement neutre, la bioraffinerie ou encore le transport électrique.

Évidemment, la transformation verte nécessite détermination et ressources. Le financement peut provenir de diverses sources. Le point de départ est que tous les pays disposent eux-mêmes d’un plan de financement de la transition. La majeure partie du financement requis doit provenir d’acteurs privés. Les fonds publics ne peuvent fournir qu’une partie du financement. Cependant, la Suède joue un rôle de premier plan dans le financement solidaire dans la lutte contre le changement climatique. Nous sommes le plus grand donateur par habitant du Fonds vert pour le climat (FVC) et du Fonds pour l’environnement mondial (FEM). La Suède est également l’un des principaux donateurs en termes absolus, par exemple, au Fonds d’ajustement (FA) et au Fonds pour les pays les moins avancés (PMA).

.

CADE : Enfin, la Suède en tant que pays membre de l’UE, comment contribue-t-elle aux efforts visant à développer les relations entre l’UE et l’Algérie ?

Ambassadeur Björn Häggmar : L’UE et l’Algérie pourront certainement avancer ensemble dans beaucoup de domaines. Avec l’Accord d’association et le Partenariat renouvelé de voisinage, il y a des structures et des financements concrets à utiliser et qui ouvrent des portes à la coopération et à l’innovation. La Suède voudrait que de nombreux acteurs – parmi eux entreprises, institutions de l’éducation supérieure, la société civile et les jeunes – examinent ces possibilités et en profitent. Les valeurs et principes de la démocratie, de l’État de droit, du développement social et durable ainsi que le respect des droits humains nous aiderons à travailler plus ensemble, à inclure les citoyennes et citoyens et leur offrir plus de possibilités de réaliser leur potentiel.

.

Entretien réalisé par l’équipe du Centre Algérien de Diplomatie Économique.  

Please follow and like us:

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Social media & sharing icons powered by UltimatelySocial
RSS
YouTube
LinkedIn
LinkedIn
Share
Instagram