Chine : « La Ceinture et la Route », une voie de confiance et de coopération gagnant-gagnant – Entretien avec M. Lionel Chen, Vice-Président de l’Association Nationale pour le Développement de la Route de la Soie

Interview réalisée le 21 Décembre 2019

Centre Algérien de Diplomatie Economique : Bonjour Monsieur Chen, avant de commencer notre interview, pourriez-vous vous présenter auprès de nos lecteurs ?

Lionel CHEN : Vice-président de l’Association Nationale pour le Développement de la Route de la Soie. Je suis par ailleurs le représentant de l’académie internationale de football du club de Metz en Chine. Entre 2002 et 2005, je fus le vice-président de l’association des étudiants chinois à l’université de la Rochelle. En outre, je participe aux diverses activités d’échange culturel et j’ai une grande expérience dans les opérations d’entreprise.

CADE : Le projet des nouvelles routes de la soie est un chantier très ambitieux, comment pourriez-vous nous le décrire dans ses grandes lignes ?

Lionel CHEN : Les nouvelles routes de la soie (NRS) sont un ensemble de liaisons terrestres et maritimes entre la Chine et un certain nombre de pays dans le monde. Le projet est très ambitieux et unique en son genre. Il sera profitable pour tous les pays participants sur ses aspects terrestre et maritime. 

L’aspect terrestre s’appuie sur de grandes artères internationales et des métropoles riveraines. On prend pour plateformes de coopération les principaux parcs économiques, commerciaux et industriels, en vue de créer un ensemble de couloirs internationaux dédiés à la coopération économique, dont le nouveau pont terrestre eurasiatique ; Le couloir Chine- Russie-Mongolie, le couloir Chine-Asie centrale-Asie de l’Ouest et le couloir Chine indochinoise.

Concernant la voie maritime, on considère les principaux ports comme des points de connexion dans l’optique de construire conjointement des voies de transports dépourvues d’obstacles, sûres et efficaces. Le couloir économique Chine- Pakistan et le couloir économique Bangladesh-Chine-Inde-Myanmar sont étroitement liés à la promotion de la construction de « la Ceinture et la Route », il faut donc développer la coopération en ce sens, avec comme principal objectif l’obtention de progrès plus notables.

CADE : Comment ce projet est-il financé ?

Lionel CHEN : Un Fonds pour les NRS a été créé, le 29 décembre 2014, conjointement par la China Investment Corporation, la Banque d’Exportation et d’Importation de Chine et la Banque de Développement en Chine (BDC).

Pour le reste, la Banque Asiatique d’Investissement pour les Infrastructures (AIIB), qui comptent 57 pays membres et un capital de plus de 100 milliards de dollars, participe à hauteur de 40 milliards de dollars à ce projet.

CADE : De quelle manière ce projet gigantesque peut participer au développement de la Chine ?

Lionel CHEN : La ceinture de la route touchera principalement et directement ces trois continents : l’Asie, l’Afrique et l’Europe. Elle permettra donc un échange commercial important et continue entre la Chine et leurs différents pays partenaires. Ces échanges commerciaux participeront en retour à la croissance de la Chine et de ce fait à son développement.

CADE : Pourriez-vous nous décrire comment La Nouvelle Route de la Soie va accroître l’influence géopolitique de la Chine dans le monde ?

Lionel CHEN : Au jour d’aujourd’hui, la Chine a signé 197 documents de coopération au sujet de « la Ceinture et la Route » avec 137 pays et 30 organisations internationales, selon un bilan dressé fin octobre.

Les pays concernés vont observer des retombées positives relativement à ce mégaprojet chinois : construction et modernisation de leurs infrastructures, aides financières, investissements indirects, échanges culturels et académiques, etc. Toutes ces actions vont faire de la Chine l’un de leur partenaire privilégié, donc influent et écouté par les décideurs des pays d’accueil.

CADE : Quels sont les mécanismes de coopération avec les différentes parties prenantes dans ce méga projet ?

Lionel CHEN : Y’en a trois :

  • Renforcer la coopération bilatérale et procéder à des communications et à des consultations à différents niveaux et par de multiples canaux :

La Chine renforcera la coopération bilatérale et procédera à des communications et du consulting sur différents aspects, à travers des canaux multiples, afin de promouvoir le développement global des relations bilatérales. Elle œuvrera pour la signature de mémorandums ou de plans de coopération en vue de construire des partenariats win-win de coopération bilatérale. La Chine établira et perfectionnera les mécanismes bilatéraux de travail conjoint, ainsi que l’élaboration des plans d’exécution et des feuilles de route en vue de la construction de « la Ceinture et la Route ».

  • Jouer le rôle des mécanismes existants de coopération multilatéraux pour le renforcement de la communication avec les pays concernés :

La Chine intensifiera le rôle des mécanismes de coopération multilatéraux, en valorisant le rôle des dispositifs existants, dont l’Organisation de Coopération de Shanghai (SCO), le mécanisme Chine-ASEAN (10+1), l’Organisation de la Coopération Économique Asie- Pacifique (APEC), le Sommet Asie-Europe (ASEM), le Dialogue pour la Coopération en Asie (ACD), la Conférence pour l’Interaction et les Mesures de Confiance en Asie (CICA), le forum sur la coopération Sino-Arabe, le Dialogue Stratégique Chine-Conseil de coopération du Golfe, le Programme de coopération économique de la sous-région du Grand Mékong (GMS).

  • Jouer le rôle constructif des plateformes régionales et sous-régionales organisées par des pays riverains :

La Chine perpétuera le rôle constructif des forums et expositions régionaux et sous-régionaux organisés par les pays riverains, ainsi que certaines plates-formes. La Chine soutient la valorisation, par les pays riverains, au niveau local, du patrimoine historique et culturel se rapportant à « la Ceinture et la Route ». Mais aussi, l’organisation conjointe des activités d’échanges commerciaux, culturels et d’investissements, l’organisation dans les meilleures conditions de la Foire culturelle internationale de la Route de la Soie (Dunhuang), du Festival cinématographique international et du Salon du livre de la Route de la Soie. En outre, la Chine propose d’instaurer un forum de «la Ceinture et la Route ».

CADE : Existe-il un risque climatique découlant de ce projet de grande ampleur ?

Lionel CHEN : La Chine a pris et continue de prendre des mesures importantes dans le domaine de l’écologie. Les aspects de conception et réalisation relatives au projet des NRS sont entreprises par des bureaux d’études et de réalisations, qui disposent de consignes claires concernant le respect des standards écologiques internationaux.

Néanmoins, comme dans tout projet d’envergure, il peut y avoir des risques bien que marginaux.

CADE : Pour conclure, pourriez-vous nous citer un exemple de projet inhérent aux Nouvelles Routes de la Soie ?

Lionel CHEN : S’il y a un projet que je peux vous citer, c’est bien celui de la ville internationale de la santé de GU’AN. Un projet dans la valeur se chiffre à coup de milliards de dollars, et qui va permettre à la Chine de développer le tourisme médical et de soins, tout en développant la zone thermale de Jingnan. Un secteur para hôtelier est prévu pour les personnes âgées (du style EHPAD en France) avec des conditions de soins et de conforts améliorés. La partie hôtellerie et immobilier de la ville internationale de la santé permettra d’attirer une clientèle internationale intéressée par les soins esthétiques où de nombreux professeurs de renommés exerceront.

Un financement pour ce projet est déjà prévu principalement par l’Etat et les différents acteurs économiques chinois.

Par ailleurs, je tiens à préciser que nous allons avoir besoin de l’expertise et du savoir-faire des différents acteurs internationaux dans le domaine de la santé, dans des spécialités où la Chine enregistre un certain retard. Je pense à la diététique, l’obésité, les cures thermales et la balnéothérapie. Toute contribution émanant des entreprises, médecins, chercheurs, praticiens et spécialistes sera la bienvenue.

Interview réalisée par l’équipe du Centre Algérien de Diplomatie Économique.

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