Intelligence personnelle et professionnelle – Entretien avec Christophe Clarinard, Co-Président de l’Association pour le Développement de l’Intelligence Personnelle et Professionnelle (DIP2)

Entretien publié le Mardi 28 Juin 2022

Centre Algérien de Diplomatie Economique : Bonjour Christophe Clarinard, pourriez-vous vous présenter auprès de nos lecteurs ?

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Bonjour. J’ai fait carrière dans la Gendarmerie Nationale Française pendant 35 ans. Au sein de cette institution, après m’être investi quelques années dans le maintien de l’ordre et la sécurité publique, je me suis spécialisé dès 2006 dans le domaine de l’intelligence économique stratégique, afin de contribuer à la sûreté-sécurité des entreprises et des organisations. J’exerce aujourd’hui, dans le secteur privé, des fonctions d’audit, de conseil et de formation sur ces thématiques. Je suis par ailleurs co-fondateur de la toute jeune Association pour le Développement de l’Intelligence Personnelle et Professionnelle (DIP2).

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CADE : Quelles sont vos activités au sein de l’association pour le Développement de l’Intelligence Personnelle et Professionnelle (DIP2) ?

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Je suis co-président de l’Association, aux côtés du Dr Olivier Pommeret. Nous avons d’abord pensé ce club comme un « think tank ». Il a pour objectif de faire connaitre et de promouvoir l’intelligence personnelle et l’intelligence professionnelle, mais aussi de fédérer les différents acteurs souhaitant participer au développement de ces deux approches conceptuelles.  Car il ressort de nos entretiens avec des chefs d’entreprises, ainsi qu’avec des professionnels de la veille, de la sûreté-sécurité et de l’influence, notamment dans le domaine factuel de la cybersécurité, qu’un intérêt majeur pour l’intégration de l’humain et des “sciences” qui en découlent, telles la Psychologie, l’Intelligence Emotionnelle ou les Neurosciences, à l’univers de l’Intelligence Economique se fait jour. Ainsi, il nous a semblé judicieux de pouvoir réunir toutes les personnes motivées par ces réflexions au sein d’une structure associative. Aujourd’hui, l’association s’ouvre à toutes celles et tous ceux qui souhaitent mettre en application, dans leur vie de tous les jours, pour elles ou leurs proches, l’Intelligence Personnelle, puis de la décliner dans leurs activités professionnelles. Tout le monde peut adhérer.

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CADE : Qu’est-ce que l’intelligence personnelle ?

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Comme nous l’expliquons sur notre site web (https://www.intelligence-personnelle.fr/quest-ce-que-lintelligence-personnelle/), l’Intelligence Personnelle est la transposition de l’ADN de l’Intelligence Economique … aux individus. Cela consiste donc en une vraie démarche de développement personnel basée sur la maitrise de l’information. Elle vise à améliorer le quotidien des gens, notamment leur bonheur et leur réussite par des choix éclairés et sécurisants, tout comme l’Intelligence Economique améliore la performance et la compétitivité des entreprises. Au-delà de son intérêt en matière de développement personnel, la pratique de l’Intelligence Personnelle par des salariés ou collaborateurs peut également intéresser les cadres et les dirigeants qui souhaitent instaurer ou améliorer leur démarche d’Intelligence Economique au sein de leur organisation. En effet, l’enseignement des principes de l’Intelligence Economique, ramené à son aspect « intelligence personnelle » pour soi, facilite leur compréhension, leur apprentissage et leur adoption. En faire une habitude de vie, chez soi et pour soi, entraine facilement la mise en place de cette démarche (acte réflexe) dans un cadre professionnel. A ce jour, l’exclusion des salariés du processus reste un des principaux obstacles du développement de l’intelligence économique à tous les niveaux de l’organisation. Par le choix d’une formation en Intelligence Personnelle, salariés/collaborateurs et chefs d’entreprises sont tous gagnants.

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CADE : Quelle définition faites-vous au concept d’intelligence professionnelle comparativement à la notion d’intelligence économique ?

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Depuis 1994 (Rapport « Martre ») , le vocable « Intelligence Économique » est parfaitement compris par les dirigeants et les cadres supérieurs de toute organisation. Bien qu’aujourd’hui communément admis, ce vocable nécessite de devoir souvent expliquer et réexpliquer ce qu’est l’Intelligence économique. D’autant que plusieurs affaires d’espionnage ou de lobbying/manipulation ont été largement médiatisées et faussement assimilées à des pratiques dites d’Intelligence Economique. L’Intelligence Economique, qu’elle soit mise en œuvre par les organisations, les entreprises ou les collectivités territoriales, repose sur la maitrise de l’information stratégique dans un contexte « professionnel » !

Or, les principes et la finalité de l’Intelligence Economique peuvent servir, lorsqu’on les transpose aux gens, au développement individuel des personnes. C’est ce que nous avons appelé « Intelligence Personnelle ». Ainsi, il nous semble approprié d’associer le terme « Intelligence », qui consiste – grâce à l’information – à faire des liens entre les choses, à l’adjectif « Professionnelle » lorsqu’il s’agit d’un contexte d’entreprise et à l’adjectif « Personnelle » lorsqu’il s’agit des individus. L’Humain fait toujours partie de l’équation, ainsi que l’évoquait Bernard Carayon en 2003 lorsqu’il parlait de “cohésion sociale”.

La principale différence entre l’Intelligence Economique, telle qu’on a l’habitude de la définir, et l’Intelligence Professionnelle, tel que nous le proposons, est donc la place que prend l’Humain dans la démarche de gestion de l’information sous toutes ses composantes : recherche, analyse, diffusion, sécurité et influence. En intégrant les « soft skills » et l’Intelligence Emotionnelle. Une autre différence majeure est le fait que l’Intelligence Professionnelle va rechercher la performance « sociale », le bien être des salariés, la recherche de sens au-delà de des aspects purement économiques et de compétitivité.

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CADE : Selon vous, pourquoi devrait-on passer de l’intelligence économique à l’intelligence personnelle et professionnelle ?

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Les secondes ne remplacent pas la première, car elles restent complémentaires et procèdent, toutes, d’une première brique : le besoin (de l’entreprise, de l’individu).

Comme nous l’expliquons sur notre site internet, dans ce schéma qui dérive de la « Pyramide de Maslow » et considère l’entreprise comme un organisme vivant, dans une économie de la connaissance, l’information est à la fois l’eau, l’oxygène et la nourriture sans lesquels toutes et tous ne peuvent se développer. Ainsi, la recherche d’information (de la bonne information) est une activité essentielle de l’Intelligence Personnelle… tout comme l’assouvissement des besoins physiologiques l’est pour les individus. C’est sur ce premier domaine qu’il est utile de former les personnes. Une fois la recherche pragmatique d’informations intégrée, les gens ont besoin de se protéger et sécuriser ce qu’ils savent, de savoir ce qu’il peut être dit ou non en fonction des personnes et des situations. Le processus nous entraîne ensuite vers le besoin d’appartenance, c’est à dire l’interaction avec les autres, le développement de relations et la capacité à faire passer ses idées dans le groupe, à faire preuve d’influence. Dis comme cela, il parait naturel de ne pas s’exprimer sans avoir au préalable estimé quelles informations sont communicables à autrui. Et pourtant, au quotidien, combien d’entre-nous parlent sans réfléchir aux conséquences de leurs paroles. Dans l’ordre vient ainsi ensuite la maîtrise de l’image perçue et l’appréciation des autres, c’est à dire l’e-réputation. Cette phase correspond au développement de l’estime de soi, qui permet de se positionner correctement dans l’environnement et créer le climat de confiance nécessaire aux échanges et aux interactions avec autrui. Dernière étape, le besoin d’accomplissement : il correspond au management des connaissances. C’est à ce stade qu’on essaye de se dépasser, d’améliorer ses compétences et ses connaissances pour son épanouissement et le phasage avec ses propres valeurs.

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CADE : Quel est l’intérêt de se former à l’intelligence personnelle et professionnelle ? Y a-t-il des différences par rapport aux formations classiques en intelligence économique ?

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L’Intelligence Economique est d’abord là pour assurer la pérennité financière de l’entreprise, conforter son besoin en trésorerie et faire un minimum de bénéfices. Mais si les entreprises cherchent bien évidemment à générer des bénéfices, un courant, amplifié dernièrement par la crise sanitaire liée au Covid 19, pousse ces dernières à vouloir le faire de plus en plus avec l’adhésion pleine et entière de leurs collaborateurs/salariés : entreprise libérée, apprentissage de la pleine conscience, lutte contre le “burn-out”, rejet des activités non éthiques e/ou quête de sens… Tous ces concepts “dans le vent” nous emmènent vers une mutation du monde du travail qui est, nous en sommes convaincus, bien plus durable que ce qu’il n’y parait. Ainsi, dans le concept d’Intelligence Professionnelle, la recherche de bénéfices est prise en compte, car créatrice et garante des emplois, mais pas au détriment d’autres concepts tout aussi importants comme le bien être des salariés et la recherche de sens, influant positivement sur la motivation, qui est primordiale pour la performance globale de l’entreprise. Cette quête, motivant et servant in fine l’entreprise dans un partenariat gagnant/gagnant, passe par l’acculturation à l’Intelligence Personnelle. Cette dernière permet notamment l’intégration des principes d’Intelligence Emotionnelle et de Psychologie Positive. L’apprentissage de l’Intelligence Personnelle permet ainsi de faire passer les entreprises de l’ère de l’Intelligence Economique à une “nouvelle version” centrée sur le capital humain, celle de l’ère de l’Intelligence Professionnelle.

Du point de vue pédagogique, nous restons persuadés qu’il est plus efficace pour les personnes de comprendre les principes de l’intelligence économique si elles trouvent un intérêt à les mettre en pratique dans leur vie quotidienne, notamment à titre personnel … et par ricochet, à titre professionnel.

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Interview réalisé par l’équipe du Centre Algérien de Diplomatie Economique. 

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